The Police

Naissance

London, London, England

Biographie

C’est à la toute fin de l’année 1976 que la scène punk britannique, alors en pleine effervescence, voit naître la formation The Police, suite à la rencontre du batteur Stewart Copeland, qui officiait jusqu’alors dans le groupe de rock progressif Curved Air et un jeune guitariste français, Henry Padovani, qui venait d’arriver à Londres. S’il leur manque un bassiste, Stewart Copeland a déjà dans son viseur Gordon Matthew Sumner, alias Sting, qu’il a repéré lors d’un concert de son groupe Last exit peu de temps auparavant. À peine le trio formé, il se retrouve en studio pour enregistrer ses deux premiers morceaux, « Fall Out » et « Nothing Achieving », qui connaissent un beau petit succès localement et permet à The Police de partir en tournée en première partie de la chanteuse américaine Cherry Vanilla, qu’il doit ensuite accompagner pour son propre set. Peu à peu, The Police se fait un nom, et n’hésite pas à aller conquérir de nouveaux territoires afin de ne pas rester confiné au Royaume-Uni. Andy Summers arrive dans le sillage du groupe et offre son expérience au trio… à condition que le groupe reste un trio et qu’il prenne la place d’Henry Padovani. Un consensus est trouvé, mais il ne dure que l’espace de deux concerts. Finalement, Henry Padovani s’éclipse et Andy Summers ancre sa guitare gorgée de chorus et de flanger au sein du groupe pour la postérité. Suivront cinq albums : Outlandos d'Amour en 1978, Reggatta de Blanc en 1979, Zenyattà Mondatta en 1980, Ghost in the Machine en 1981 et Synchronicity en 1983. Les tubes essaimés au cours de ces quelques années restent des indémodables de la sphère pop-rock, de « Every Little Thing She Does is Magic » à « Roxanne », en passant par « Every Breath You Take », « So Lonely » ou encore « Walking on the Moon ». Mais le groupe a aussi exploré de nombreux autres styles musicaux au cours de sa courte carrière : new wave, post punk ou encore reggae. Au-delà des très nombreuses compilations qui ont garni la discographie de The Police au fil des ans, le trio a su se retrouver brièvement en 1986 et surtout en 2007-2008 afin de célébrer par le biais d’une grande tournée mondiale son œuvre intemporelle.

Des punks pas comme les autres

Ce n’est guère un hasard ou un malentendu si The Police a été d’emblée rattaché au phénomène punk. Son premier simple « Fall Out » (octobre 1977) montre suffisamment d’énergie pour figurer dignement aux côtés des classiques de The Clash ou The Stranglers, sans pour autant rivaliser avec l’attitude et l’esthétique nihiliste des Sex Pistols.

Dans les faits, le trio originel constitué de Gordon Sumner alias Sting (basse et chant), Stewart Copeland (batterie) et du guitariste corse Henri Padovani n’est pas exactement un orchestre de débutants. C’est l’Américain Copeland, fils d’un agent de la CIA émigré à Londres et ex-Curved Air (groupe de rock progressif) qui trouve le patronyme de la formation et recrute Sting (devant son surnom de « Dard » en raison de ses éternels polos rayés jaune et noir), un professeur auteur-compositeur, chanteur-bassiste et saxophoniste du combo jazz-rock Last Exit à ses heures. Avec le producteur Mike Howlett, le quatuor baptisé Strontium 90 participe au concert de réunion du groupe progressif franco-anglais Gong le 28 mai 1977 à Paris (cf. le CD Strontium 90 : Police Academy paru en 1997).

Après quelques gigs dans les clubs londoniens et un passage au fameux festival punk de Mont-de-Marsan, le trio tout blond peroxydé – caractéristique héritée du tournage d’une publicité pour chewing-gum – est signé et pris en main par Miles Copeland, frère de Stewart et propriétaire du label Illegal Records (IRS). Alors que le simple « Fall Out » obtient un certain succès dépassant les scores habituels des groupes indépendants, et que le groupe enregistre sous la houlette de John Cale sans suite probante, Padovani préfère rejoindre le groupe du transexuel Wayne County, The Electric Chairs. Puis former ses propres Flying Padovanis. En 2006, il livrera ses mémoires d’ex-Policeman. Il est remplacé par un vétéran de la scène anglaise des sixties, Andy Summers (guitare Telecaster), ancien membre des groupes Animals (d’Eric Burdon), Zoot Money’s Big Roll Band et Kevin Ayers Band. Ce nouveau départ s’accompagne d’une signature sur A&M bénéficiant ainsi d’une distribution plus étendue et de la publication de « Roxanne » (printemps 1978) contant l’histoire d’une prostituée. Une tournée américaine dans un bus de location plus tard, The Police termine l’enregistrement de son premier album Outlandos d’Amour inaugurant une série de disques aux intitulés étranges. Le retour en Angleterre pour un mini-tour en première partie d’Alberto Y Los Trios Paranoïas – inénarrable formation parodique mélange de Monty Python et de Status Quo – suscite davantage de réactions de la part des critiques locaux, emballés par le simple « So Lonely » et « Can’t Stand Losing You » tandis que l’apparition de « Roxanne » sur le marché anglais place ce titre en 12ème position des classements, l’album grimpant jusqu’à la 6ème place. En cet été 1979, Sting est sur les écrans, jouant au mod dans l’adaptation cinématographique du Quadrophenia des Who par Franc Roddam puis dans Radio On (Christopher Petit).

Policemania

Dès l’automne, l’ascension de la notoriété du groupe semble irrésistible avec la parution de Regatta de Blanc, huit millions de copies vendues et quatre semaines d’affilée en première place des charts, porté par le vaste succès de « Message In A Bottle », le grand classique du groupe trustant les hit-parades du monde entier. L’ambitieuse tournée qui s’ensuit montre la formation se produire aux quatre coins de l’univers dans des pays tels que la Thaïlande, l’Inde ou le Mexique, recevant pour la première fois un groupe de rock. Le phénomène est vite comparé à ses antécédents des décennies soixante et soixante-dix, Beatlemania et T.Rextasy.

Malgré toute cette pression, The Police trouve le temps de se consacrer à l’enregistrement de Zenyatta Mondatta qui à son tour fait succomber la portion américaine du globe avec ses imparables hits « Don’t Stand So Close To Me » (n°1) et « De Do Do Do, De Da Da Da » (n°10). Il y a comme une certaine ironie de la part des Policemen à imposer des noms mystiques et farfelus, mais souvent le propos des chansons écrites par Sting se révèle bien plus concerné par les observations métaphysiques de cet éternel professeur.

Sans relâche, une tournée et un album suivent à un rythme qui finira par avoir raison de la solidité du groupe. L’année 1981 est marquée par l’album Ghost In The Machine (n°1) et l’option technologique adoptée par le producteur Hugh Padgham (Peter Gabriel, XTC, Yes). Un tournant qui ne fait guère l’unanimité en dépit d’indéniables réussites comme « Everything Little Thing She Does Is Magic », « Invisible Sun » ou « Demolition Man ». Pour certains, la machine paraît grippée, voyant dans les textes désenchantés sous influence d’Arthur Koestler (« Entre le zéro et l’infini ») les signes d’un craquellement de la dream team, mais le public offre son plébiscite sans réserve aux vainqueurs de trois Grammy Awards britanniques (dont celui de meilleur groupe).

Après quoi le trio prend une pause salvatrice, le temps pour Sting de faire le maître de cérémonie en organisant les deux concerts du Secret Policeman’s Other Ball au profit d’Amnesty International, réunissant Pete Townshend, Eric Clapton, Jeff Beck, Donovan, Phil Collins et quelques Monty Python. Puis d’apparaître au générique de Brimstone And Treacle (Richard Loncraine) dont est extrait la chanson « Spread A Little Happiness ». Quant à Stewart Copeland, déjà auteur d’un mini-album sous pseudo Klark Kent (1980) réunissant des compositions refusées par les autres membres, il en profite pour composer diverses musiques parmi lesquelles la bande originale du film Rumble Fish (Rusty James, Francis Ford Coppola) et jouer avec Mike Rutherford. Enfin, Andy Summers y va de son projet expérimental avec Robert Fripp pour I Advance Masked.

Epilogue

Le retour de Police est donc plus que vivement attendu durant l’année 1983. Les fans ne seront pas déçus à l’écoute de Synchronicity qui s’impose sans difficulté comme l’un des rares joyaux de l’année dans un contexte où le rock perd de sa superbe au profit des tubes calibrés de MTV et des super-productions ronflantes. L’album inspiré par la pensée de Carl-Gustav Jung propose l’imparable « Every Breath You Take » en quelque sorte le « Yesterday » de Sting, recordman des passages radio, et « Wrapped Around Your Finger ». Le power trio des débuts est bien loin maintenant, et les signes d’une rupture plus probants à l’image d’une pochette divisées en trois bandes et trois couleurs, référence involontaire à Let It Be, chant du cygne des Fab Four. Le travail sur ce disque fut autant cauchemardesque.

La tournée (d’adieu) passe par les plus grands stades, bourrant le Shea Stadium de New York avant l’annonce d’un « retrait sabbatique » consacré aux multiples projets des membres : Sting œuvre en solo pour le magnifique The Dream Of The Blue Turtles (1985) précipitant la fin du groupe, Copeland s’attelant à son album world The Rhythmatist tout en composant musiques de films et ballets, et Summers officiant encore avec Robert Fripp dans Bewitched (1984).

En lieu et place d’une réunion au sommet, The Police revient avec une nouvelle version de « Don’t Stand So Close To Me » (n°1 !) pour les besoins de la compilation Every Breath You Take : The Singles (1986), Sting gardant en réserve ses dernières compositions pour sa fructueuse carrière. La rupture est désormais consommée.

En 1993, le coffret commémoratif Message In A Box : The Complete Recordings fait revivre l’aventure, bientôt suivi par le double Live ! (1995) premier témoignage en public du groupe. En 97, le rappeur américain Sean « Puffy » Combs (P. Diddy) obtient un n°1 en samplant « Every Breath You Take » pour son « I’ll Be Missing You » en hommage à Notorious B.I.G assassiné.

Il faudra attendre le 10 mars 2003 pour que The Police soit intronisé au Rock And Roll Hall Of Fame américain.

Reformation

Après les expériences des plus diverses de la part des trois musiciens et à la surprise générale, The Police renaît le 11 février 2007 sur la scène du Staples Center de Los Angeles lors de la remise des Grammy Awards. Une tournée exceptionnelle est vite annoncée, laissant une chance à ceux qui n’ont jamais pu voir l’un des plus groupes les plus importants de ces trente dernières années de se rattraper.

Dernière Sortie

20 mai 2022