Al Green

Naissance

13 Avril 1946, Forrest City, Arkansas, United States

Biographie

Dernier grand chanteur de soul music à être apparu durant les années soixante-dix dans le Sud des États-Unis, Al Green a connu dès ses débuts un succès mondial (« Let’s Stay Together », « Sha La La (Make Me Happy) », « L.O.V.E. »). Un drame personnel lui a fait embrasser une carrière de pasteur. Il se partage aujourd’hui entre une inspiration religieuse (et des albums de gospel), et des chansons plus profanes, qui lui permettent de chanter en compagnie des plus grands artistes. Entre Dieu et la danse, Al Green, et pour notre plus grand bonheur, n’a jamais vraiment choisi.


C’est la faute de Sam Cooke.
Personne ne s‘en aperçoit à sa naissance, mais le petit Albert

Premiers groupes

Mais dès son adolescence, Al Green(e) montre une forte prédisposition pour la musique du Diable : Jackie Wilson est son idole (au grand dam de son père, qui surprend un jour son rejeton en extase devant un disque de celui qu’on surnommait l’Elvis Presley noir), et il crée Al Greene & The Creations, puis Al Greene & The Soul Mates, qui, dès 1968, connaissent un succès fulgurant (le single « Back Up Train » atteindra le Top 5, à telle enseigne que Greene récupèrera le titre au bénéfice de son premier album, édité par l’éphémère petit label Hot Line Music).

Rencontre avec Willie Mitchell

C’est après avoir croisé Willie Mitchell, l’un des patrons de Hi Records (et qui fut trompettiste et chef d’orchestre de certaines soirées privées organisées par Elvis Presley), label de Memphis, subjugué par la voix du jeune homme, son sens du rythme, et sa sensualité, qu’Al Green envisage une carrière solo.
Mitchell l’engage initialement comme chanteur de son propre groupe, mais saisit rapidement le potentiel de son nouveau compère. Ils forment une paire parfaitement complémentaire, experte dans l’art difficile de la composition de refrains populaires.

Al Green est né

Le chanteur perd le « e » final de son nom, et gagne le droit d’enregistrer quelques disques (dont une reprise du « I Wanna Hold Your Hand » de The Beatles), au succès sympathique.
Ces gammes en galop d’essai lui permettent d’instaurer ce qui sera sa couleur sonore, des décennies durant : basse impériale, interventions de plus en plus plénipotentiaires de la guitare et de divers claviers, et mise en avant des modulations du chant.
A chaque nouvel album (Green Is Blues en 1970, Al Green Gets Next To You en 1971, Let’s Stay Together en 1972, I’m Still In Love With You en 1973, et, en 1974, Call Me, et Al Green Explores Your Mind, dont le « Take Me to the River » sera repris par Talking Heads sur leur deuxième album), le chanteur progresse d’un pas, vers le trône du plus grand artiste soul du moment.

Drame, et conversion

Pourtant, le 18 octobre 1974, le malheur s’invite à la table de l’artiste. Suite à une violente dispute avec Mary Woodson, fiancée délaissée du moment, qui se voit une nouvelle fois refuser le mariage, cette dernière verse sur Al Green de la bouillie de maïs, lui infligeant des brûlures au deuxième degré sur le dos et le bras, alors que ce dernier se trouve sous la douche. Puis, la jeune femme passe dans la pièce contiguë, et se tire une balle dans la tête.
Profondément meurtri par ce drame amoureux, Green trouve réconfort dans la foi, rallie en 1976 l’église pentecôtiste, est baptisé, et est ordonné pasteur du Full Gospel Tabernacle de Memphis (un temple dont il est en fait propriétaire).
Dans l’élan de sa carrière, le chanteur enregistre des albums : Al Green Is Love en 1975, Full Of Fire, et Have A Good Time en 1976, désormais plus introspectifs, et qui séduisent bien moins les hit-parades.
De même, l’un des couples de créateurs les plus emblématiques de la soul music ne résiste pas à cette mutation, et Willie Mitchell s’en va.

Au service de Dieu

Green crée alors son propre label (American Music) sur lequel il enregistre en 1977 The Belle Album, salué par la critique, et suivi de Truth And Time (1978). Toutefois, comme un ressort cassé, le succès lui échappe désormais.
En outre, un nouvel accident (il chute de scène en plein concert à Cincinnati) convainc en 1979 le chanteur de ne plus se consacrer qu’à la musique de Dieu : il devient alors un artiste de gospel reconnu, accumulant les Grammy Awards (huit) en autant de récompenses honorifiques.
L’album The Lord Will Make A Way (1980), ou sa participation au spectacle musical de Broadway Your Arms Too Short To Box With God (en compagnie de Patti Labelle, 1982), l’installent comme une figure prééminente du genre.

Retour vers la soul music

Peu à peu, Al Green renoue pourtant progressivement avec une musique plus profane : il retrouve Willie Mitchell pour He Is the Light (1985), enregistre avec l’ex Eurythmics Annie Lennox « Put A Little Love In Your Heart » (1988) pour le compte d’une comédie de Bill Murray (Scrooged), enregistre en 1992 le très beau Don’t Look Back, puis, en 1994, avec le chanteur de country Lyle Lovett (obtenant par là-même un nouveau Grammy Award).
Et c’est alors que paraît un nouveau disque, Your Heart’s In Good Hands (1995) qu’Al Green est honoré par le Rock and Roll Hall of Fame.
En 2000, Al Green a rédigé son autobiographie, intitulée Take Me to the River.
Bien que toujours pasteur et prêcheur (il sert encore la messe tous les dimanches), les derniers enregistrements d’Al Green (I Can’t Stop en 2003, Everything’s OK en 2005, et Lay It Down en 2008) constituent de pures productions de soul music, et trahissent très nettement un retour au son originel de ses premiers grands triomphes.
Il a reçu en 2008 un Grammy Award pour l’ensemble de sa carrière : reconnaissance évidente pour un artiste qui a influencé, non seulement ses contemporains, mais également des chanteurs comme Marvin Gaye.